Pierre Foglia pour le contexte est un français installé au Québec depuis des lustres qui écrit pour la Presse, quotidien de grande écoute (lecture puisque c'est un journal presse mais bon...).
Le 23 janvier dernier, il écrivait sur le parcours des immigrants. Un écho à une chronique que j'avais écrit voila bientôt un an.
Ainsi quand il écrit "Un immigrant est d'abord un émigrant. En dépit des apparences, il n'arrive pas. Il QUITTE. Et il va rester dans cet état «de partance» pendant plusieurs années.", j'avais moi parlé du choc culturel et des montagnes russes qui permettront à l'émigrant de devenir immigrant. En clair, sans le choc culturel qui demande de remettre en cause le filtre de notre vision du monde et de bouleverser les repères et les valeurs qui sont les nôtres, on ne peut faire de place aux repères de la nouvelle société.
Ce que Foglia explique par son "Ce à quoi il ne s'attendait pas, par contre, ce qu'il découvre, stupéfait, c'est que ce pays qu'il pensait avoir quitté, la Russie, le Liban, la France, le Maroc, le Sri Lanka, ce pays l'a suivi au Canada. Un an, deux ans, trois ans plus tard, il n'est toujours pas d'ici. Dans le plus banal des gestes du quotidien, quand il mange, quand il écoute le téléjournal et se demande où est La Tuque, quand il n'en a rien à foutre que le Canadien ait gagné 4 à 2, il est encore de là-bas. " Ce sont ces gestes et cette absence d'intérêt qui vont peu à peu laisser place ou non à de nouveaux gestes et à un regain d'intérêt.
"Cela lui prendra des années pour muer, pour sortir de sa vieille peau de Russe, de Libanais, de Français, de Marocain. " ajoute-t-il ensuite, fort à propos.
L'immigrant, pour faire ce mouvement de in- devra poursuive un chemin que lui seul est à même de faire, personne, ni sa femme, ni ses amis, ni ses enfants, ni sa société d'accueil ou d'origine ne pourront le faire à sa place. L'aider peut-être, tout au moins en lui reflétant par leurs propres chocs culturels ce qu'il vit. Mais cette mutation se pense à l'intérieur de soi. La différence c'est que certaines sociétés vont être ouvertes à laisser du temps pour que cela se passe quand d'autres seront pressées que cela arrive voire par leur conjoncture ou leur agencement se retrouveront, inconsciemment on l'espère, à ralentir ce changement, se plaignant par la suite qu'il n'est pas eut lieu.
Une piste pour les générations présentes et à venir, qui seront irrémédiablement aux prises avec les migrations mondiales, sera la piste de la réflexion sur les outils, les freins, les adjuvants, les opposants qu'un émigrant/immigrant rencontre dans les sociétés, pour permettre enfin que tous puissent vivre ou ils le souhaitent, sans heurter personne.
Un beau rêve, je sais!