11.8.06

La Marseillaise rielliste

Il y a quelques semaines, je retranscrivais ici mes découvertes sur la Marseillaise (cliquez sur le titre pour retourner à cet épisode) sans me douter d'en faire une autre plus grande encore.
En écrivant le dernier chapitre de l'histoire du Québec et du Canada dans mon mémoire, je suis revenue sur l'épisode de Louis Riel.

En 1885, les Métis du Canada, ce groupe issus des unions entre les coureurs des bois, ces "aventuriers" québécois, et des filles autochtones, se soulèvent de nouveau. Sédentarisés par la force des choses, ils réclament des titres de propriété au gouvernement et craignent de perdre tout ou partie de leurs terres au profit de la Canadian Pacific Railway. Ils font appel à Louis Riel, alors au Montana (USA). Riel est convaincu que le gouvernement ne s'intéresse guère aux Métis et estime que seule la résistance armée permettra d'obtenir un sursaut d'intérêt. La bataille s'engage alors entre les chefs Big Bear et Poundmaker contre les troupes anglaises de Crozier au lac aux Canards. Les anglais essuient un premier forfait, remporte le suivant, sont acculés au troisième mais finissent par prendre définitivement le dessus et Riel est fait prisonnier le 15 mais 1885.

Il est conduit à Régina pour son procès devant le magistrat Richardson. C'est une réelle guerre idéologique et politique qui s'engage autour de ce procès. Les orangistes d'Ontario veulent sa mort tandis que les canadiens français souhaitent son acquittement. Les avocats de la courone, l'accusation, sont des conservateurs (la majorité du gouvernement d'alors) tandis que deux des trois avocats de la défense sont des libéraux, la principale opposition. Quel que soit le verdict, il influencera les élections suivantes.
Le procès se déroule du 20 juillet au 1er août 1885 au terme duquel Riel est reconnu coupable de haute trahison, mais le jury recommande la clémence envers lui. Le juge le condamne pourtant à mort, Louis Riel va en appel mais perd son appel. Le gouverneur MacDonald refuse son pardon et Riel est pendu le 16 novembre 1885. Le 22 novembre suivant, 40 à 50 000 personnes se réunissent au Champs de Mars, à Montréal, pour manifester son soutien au chef des Métis assassiné et s'attaque au gouvernement fédéral. On entame alors une Marseillaise que l'on conservera dans l'histoire comme étant la Marseillaise rielliste dont voici le texte (issu du livre Canada-Québec, 1534-2000 de Jacques Lacoursière, Jean Provencher et Denis Vaugeois, p. 362, reproduction d'un texte de l'Institut d'histoire de l'Amérique française, de la collection Lionel Groulx):

Enfants de la nouvelle France,
Douter de nous est plus permis!
Au gibet Riel se balance,
Victime de nos ennemis (bis).
Amis, pour nous, ah quel outrage!
Quels transports il doit exciter!
Celui qu'on vient d'exécuter
Nous anime de son courage.

Refrain: Courage! Canadiens! Tenons bien haut nos coeurs;
Un jour viendra (bis) Nous serons les vainqueurs.

Que veulent ces esclavagistes?
Que veut ce ministre étrangleur?
Pour qui ces menées orangistes,
Pour qui ces cris, cette fureur ? (bis)
Pour nous, amis, pour nous, mes frères,
Ils voudraient nous voir au cercueil,
Ces tyrans que leur fol orgueil
Aveugle et rend sourds aux prières.
Refrain.

Honte à vous, ministres infâmes,
Qui trahissez, oh! lâcheté!
¬Vous avez donc vendu vos âmes!
Judas! Que vous onti-ils payé? (bis)
Dans la campagne et dans la ville
Un jour le peuple vous dira:
Au bagne, envoyez-moi tout ça!
La corde n'est pas assez vile!
Refrain.
Ainsi, on retrouve également la Marseillaise modifiée dans l'histoire du Québec! Intéressant...
Ci dessous, un portrait de Louis Riel quelques années avant sa mort.



(© Domaine public Source : Bibliothèque et Archives Canada/C-052177)